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Amapola - Le blog d'Olivier Sebban
15 octobre 2009

Entretien concernant premier roman "Amapola" accordé par l'écrivain Salim Bachi.

A propos d'Amapola, le roman d'Olivier Sebban

Olivier_sebbanOlivier Sebban est un jeune auteur qui vient de publier son premier roman, Amapola, aux éditions du Seuil. Ce roman est d'une ambition rare. En effet, le sujet de ce livre est pour le moins inhabituel dans la littérature française contemporaine, et il faut remonter à André Malraux et à L'Espoir pour en trouver l'équivalent. Il s'agit, vous l'aurez deviné, d'un roman sur la guerre d'Espagne, terre d'élection à plusieurs titres d'Olivier Sebban. La différence avec Malraux est que la guerre d'Espagne pour Olivier Sebban n'est pas seulement le conflit d'une légitimité républicaine contre le coup de force de quelques généraux rebelles. Il s'agit en fait, dans Amapola, d'interroger la concurrence de deux raisons, de deux volontés antagoniques et parfaitement acceptables selon le camp choisi, qui varie souvent au gré du hasard, selon un ordre absurde et incompréhensible. Ce n'est plus sur des critères moraux extérieurs que se juge cette guerre particulière, mais sur une pratique humaine, forcément aveugle et imparfaite, soumise aux caprices des dieux. Plus que la guerre d'Espagne, Amapola développe l'idée du conflit armée comme métaphore du monde depuis les origines de l'humanité. Nous avons donc tenu à interroger Olivier Sebban sur son livre.

1. Pourquoi avoir choisi d’écrire un roman sur la guerre d’Espagne ?

Il existe plusieurs raisons. La première et liée à mes origines juives marocaines, tangéroises en particulier. L’espagnol était la langue maternelle de ma grand-mère et mon grand père le parlait couramment. Après l’indépendance du Maroc, mes grands-parents sont venus en France mais ils ont également acheté un petit appartement en Espagne dans lequel ils vivaient six mois de l’année. Le castillan est ma deuxième langue et ceci grâce à mes grands-parents qui ont largement contribué à mon éducation, comme c’est fréquent dans les familles méditerranéennes. L’Espagne est ma patrie de cœur, mon pays d’enfance et j’ai senti très tôt, sans les analyser à l’époque, les séquelles qu’avait laissées le conflit civil de 1936. J’ai connu l’Espagne fasciste pendant les dernières années du régime. Evidemment, je n’en conserve qu’un vague souvenir, puisque j’avais quatre ans à la mort de Franco. Mais quelque chose de l’atmosphère toxique de cette Espagne pétrifiée et isolée sur la scène internationale a longtemps perduré. J’ai suivi les progrès de cette jeune démocratie. Pendant mon adolescence, régnait encore sur le pays un tabou, une volonté d’oublier, une certaine appréhension. La tentative de coup d’état au Cortès dans les années 80 a d’ailleurs ravivé certaines inquiétudes, même si un retour en arrière était hautement improbable. Les protagonistes du conflit étaient encore bien vivants, les tensions palpables. Un jour, alors que j’accompagnais mes grands-parents chez des amis, nous avons rencontré un vieux républicain dont tout le monde murmurait qu’il avait été torturé par les fascistes après la guerre. Il connaissait bien mes grands-parents. Après avoir bavardé avec eux il m’a longuement serré la main en y glissant une pièce de 25 pts, un duro comme on dit en castillan. Je me suis longtemps interrogé sur le sens de ce don. J’aime à penser qu’il s’agissait d’une commande adressée à ma génération, bien plus qu’à moi.

La deuxième raison est d’ordre littéraire. Le roman historique offre la chance de l’imposture, une liberté d’expression peu commune. On peut aborder un sujet moderne par la bande sans jamais tomber dans la chronique ou le journalisme, ce qui me semble être le défaut de la majorité des romans français contemporains. Coller à l’actualité en sociologue se fait bien souvent au détriment du fond humain, archaïque et universel, que le progrès technologique ne bouleversera jamais. Les écrivains américains ne se gênent pas pour parler de leur histoire, même traiter celle de l’Europe. Je pense à Vollmann ou Doctorow par exemple. Il écrivent des romans sans pratiquer de distinction entre le contemporain et l’histoire, puisqu’il ne suffit pas d’établir un état des lieux, voir un état des lieux sordide et désespéré – l’inventaire factuel et détaillé d’un homme barbotant dans son temps – pour écrire une bonne histoire ou être moderne. Ce type de modernité se fane avant d’éclore.

Je pense qu’il faut se concentrer sur l’homme dans ce qu’il a d’intemporel et d’immuable, justement parce que c’est cette constance qui échappe à toute connaissance. Certains écrivains français citent Flaubert pour justifier la fadeur de leurs récits et de leur style, l’immanence jalonnée de lieux communs dans laquelle baignent leurs personnages. C’est oublier que Madame Bovary est un roman éminemment picaresque, héritier du Quichotte, oublier encore Salammbô, dont les archéologues se servent aujourd’hui pour retrouver l’atmosphère de Carthage, c’est ne pas comprendre grand chose à L’Education sentimentale, enfin négliger l’aspect lyrique, corseté certes, mais lyrique du style de Flaubert. Aussi, la guerre d’Espagne était pour moi l’occasion de parler d’un autre conflit, celui du Moyen-Orient, et de me poser la question que tout peuple en diaspora retrouvant une terre s’est déjà posé : Qu’implique le fait de regagner une patrie quand on en a si longtemps été tenu à l’écart ? C’était l’occasion de parler d’une réalité contemporaine en tenant à distance son aspect le plus trivial pour mieux se concentrer sur l’aspect humain.

2. Dans quel camp se situe Félisantes, le héros de votre roman ?

Félisantes est républicain. C’est sans doute le plus républicain de tous les personnages que l’on croise dans le roman. C’est un homme raisonnable, au sens de l’homme qui raisonne et que l’on peut raisonner, un individu que toute situation complexe pousse à réfléchir. Cette raison sans cesse chahutée par les extrêmes, par toutes sortes de pulsions, n’est évidemment pas propice à l’action, mais elle le tient éloigné d’une certaine violence. La violence ne constitue jamais un prétexte pour assouvir son ressentiment, elle n’est pas un mode d’introspection comme pour Gonzalo, un autre personnage important du roman. Le fait qu’il se considère comme un marrane n’est pas étranger à cette situation. En temps de crise identitaire, de bouleversement politique et historique, ce sont toujours les modérés, les hommes de bonne volonté qui focalisent la haine et subissent les plus graves conséquences. Les marranes endurèrent les velléités d’un christianisme conquérant mais récent, finalement peu convaincu de sa légitimité. Les républicains essuyèrent les soubresauts d’une crise mondiale et payèrent un lourd tribut à l’expérimentation totalitaire, héritière des idéologies nationalistes du XIXème. 

3. Tout au long du roman, on a souvent l’impression que Félisantes n’agit pas sur les événements, qu’il n’a pas de destin particulier. Et revenons au roman de formation, Olivier Sebban. Avez-vous voulu écrire un roman de formation ?

Oui, c’est un roman de formation dans la mesure où, contrairement à ce que prétend la sagesse populaire, la vie ne forme à rien, ni ne prépare à rien. L’existence érode sans cesse ce qu’elle a d’abord créé avant de le renvoyer au néant ou à autre chose. Peut-être que les romans de formation ne sont pas ceux qui aboutissent au changement positif d’un personnage et à son accomplissement. Dans un roman de formation il ne s’agit d’ailleurs pas d’aboutir à quelque chose ou de conclure. Le romancier n’est pas là pour conclure et je n’ai jamais trouvé de conclusion en art. Don Quichotte, à la fin de l’immense livre de Cervantès, ne s’attendait sans doute pas à mourir dans un tel état de résignation, jetant un regard de suspicion sur sa bibliothèque et ses illusions passées. Il ne s’imaginait pas revenir à l’état d’insatisfaction et d’incertitude qui l’avait initialement jeté sur les routes de la Mancha. Peut-être que le constat final du héros de roman de formation est un aveu d’impuissance face au destin, un regard d’amertume posé sur le passé, une lucidité. Cette lucidité pouvant évidement être envisagée comme une sagesse. C’est la raison pour laquelle je considère que les notions de tragédie, de picaresque et de roman de formation, sont des notions voisines dans la littérature moderne. Madame Bovary est un grand roman de formation et tout le monde sait comment finit l’héroïne de Flaubert. Un roman de formation est un livre où le personnage central se fatigue beaucoup pour pas grand chose, sauf si l’on considère, évidemment, que le chemin et la quête prime sur le résultat.

J’ai donc effectivement conçu Amapola comme un roman de formation. Amapola décrit le parcours d’un homme qui, au seuil de la mort, réitère inlassablement son voyage sans en modifier le cours, quand bien même la mémoire est infidèle et s’arrange avec le passé. Je voulais d’ailleurs que Félisantes, mon personnage principal, ait quelque chose du mystique, partageant avec lui cette faculté à ne jamais s’interrompre dans son questionnement et j’ai basé la trame de mon livre sur le Quichotte, car je considère le Chevalier à la triste figure comme l’archétype du mystique. Le mystique s’initie au contact de ses doutes, de ses angoisses et de ses certitudes. Ses visions ne sont que le reflet amoindri de ce qu’il cherche à atteindre. Sancho et sa sagesse proverbiale constitue la part terrestre de Don Quichotte. Voilà pourquoi Zancas, autre personnage du livre, (dont le prénom, l’un des surnoms de Sancho, veut littéralement dire « court sur patte »), est lui aussi le double de Féli. Féli est un être tiraillé entre ciel et terre, un marrane, un personnage qui cherche à retrouver ce qu’on lui a enlevé, ce qu’il a perdu et de ce fait, le réinvente. Son destin est d’être un exilé, privé de sa terre au sein de son propre pays, ce qui lui permet d’avoir une approche moins dogmatique que ses contemporains, plus distante. L’hésitation de Félisantes est une marque de constance, une modération, un patriotisme intelligent. Elle le conduira d’ailleurs au véritable engagement.

4. Qui est Amapola ? Que représente-t-elle pour Félisantes ? Pourquoi intervient-elle si tard dans le récit ? Pourquoi disparaît-elle tout aussi vite ? Félisantes est-il condamné à la solitude qui a conduit son grand-père au suicide ?

Amapola est un personnage capital malgré sa brève apparition. Elle est annoncée dés la scène du bordel, on la retrouve également sous les traits d’une femme peinte sur l’étiquette d’une bouteille d’huile d’olive au moment de la mort du frère de Félisantes. Tout le roman se constitue autour de plusieurs manques. L’un de ses manques est matérialisé par l’exil. Amapola est celle qui met fin à l’exil. Elle est dans le judaïsme, ce que les mystiques appellent la Shekhina, la présence divine. Leur union constitue une sorte de retour symbolique à la terre ainsi que la fin de la guerre au plus fort du conflit. L’enfantement d’Amapola devrait concrétiser et accomplir ce qui est annoncé très tôt dans le récit, mais l’exil recommence. Amapola ne pouvait pas apparaître tout au long du livre. Je souhaitais qu’elle soit juste un point culminant dans la vie de Félisantes, un repère autour duquel sa mémoire ne cessera tourner, comme les juifs chassés de Tolède en 1492 ont toujours rêvé de revenir à Tolède, Tolède étant bien sûr la transfiguration de Jérusalem.

5. Pourquoi avoir choisi d’écrire sur un descendant de marrane ? Que représente le marranisme pour vous ? Quel est le rapport avec la guerre d’Espagne ? Quels sont les liens de Félisantes avec la terre espagnole ? Ne s’agit-il pas là d’une des multiples ambiguïtés de ce roman ?

Il m’est apparu que l’histoire, pendant la guerre civile avait accompli un retour sur elle-même. Les épisodes refoulés durant la reconquête et la grande expulsion de 1492 ont soudain affleuré en 1936. L’Espagne a fondé son unité – une autre unité que l’Espagne maure d’Al Andalus – sur la conviction outrée qu’elle était et ne pouvait être que Chrétienne. Or ce pays avait toujours été composite et les chrétiens de fraîche tradition, païens de longue date, ont dû se convaincre de leur légitimité à grand renfort de prosélytisme. Il me semble qu’en 1936, le mythe de la lipieza de sangre (la pureté du sang) n’est pas revenu par hasard et l’on a vu des Carlistes, des nationalistes, des fascistes, revendiquer leur appartenance chrétienne contre l’athéisme des marxistes et des anarchistes. Mais les communistes et les libertaires ne revendiquaient finalement rien de plus qu’un nouveau messianisme. Je ne prétend pas que la guerre civile espagnole soit un conflit religieux. Il s’agit bien plus d’un antagonisme économique et idéologique. Mais quand une idéologie où une religion, faute d’intelligence, devient juste une variante de la superstition, elle sombre irrémédiablement dans l’immanence. L’immanence, quand elle n’est qu’une variante de la superstition et de l’idolâtrie me semble propice au massacre. Le marrane, selon moi, était le mieux à même d’incarner la république sommée de disparaître, se déliter en exil ou en la conversion, broyée entre les dogmes de l’ordre et du désordre comme disait Paul Valéry, le grand soir prolétaire ou la mise au pas de l’oie, les icônes providentielles de Staline et de Franco.

6. Félisantes sort-il indemne de cette guerre ? A-t-il appris quelque chose ?

Félisantes ne sort jamais de cette guerre. Il y retourne sans cesse. Il ne fait que fabriquer de la mémoire, un temps retrouvé qui ressemble plus à une œuvre infernale qu’à un paradis perdu. J’ai toujours eu l’impression que mon personnage conversait avec des ombres, que tout le roman était en réalité une discussion avec les morts et leur legs. Félisantes est un héritier, il porte les voix des défunts à bout de bras avant de devenir lui-même une ombre. On peut même penser qu’il en est une. Disons qu’il déambule entre deux mondes. Il s’agit bien sûr d’une des caractéristiques du marrane. Ce qu’il apprend au fil du livre, c’est à hériter, à reconstituer une terre de mémoire, à la tisser de mots. Il s’agit pas de reconquérir physiquement l’Espagne comme son grand-père en achetant une oliveraie, ni de l’aimer à distance comme son père plongé dans le dogmatisme religieux. Il s’agit de la tenir en soi comme un livre. Il s’agit d’y vivre mais aussi de la parcourir comme on lit un livre. Pour moi Félisantes est un vrai talmudiste.

7. Pourquoi Félisantes abandonne-t-il le fils qu’il a eu avec Amapola ? Quels sont ses rapports avec son père et son grand-père ? Est-il un bon fils ? Sera-t-il jamais un bon père ?

Il abandonne son fils en sachant qu’il ne pourra rien lui apporter. Comment un homme partagé entre le royaume des morts et celui des vivants pourrait-il élever un enfant ? Mais son fils représente également cette part d’Espagne arrachée à elle-même, contrainte à l’exil, la génération de ceux qui furent jetés en diaspora dés leur naissance. Son fils incarne à la fois la part d’Amapola que Féli ne pense plus mériter et la République en répudiée.

Féli est l’héritier direct de son grand père et son imprécation à s’emparer de la terre. Il le fait à sa manière, comme je l’ai dit plus haut. Pour lui, la terre est un livre, un objet physique certes, mais également cousu de mots, façonné comme la mémoire et les mythes qui la fondent.

Ces rapports avec son père sont tendus, pourtant c’est le repli de son père dans la religion qui le poussera à s’émanciper. Il le fera d’abord en s’engageant dans l’armée, du mauvais côté et sans savoir vraiment pourquoi, puis il finira par trouver sa voie et sa propre voix au milieu des réminiscences qui l’assaillent.

Félisantes est le fils qu’il peut être avec le père qu’il a. La réciproque est valable pour son père. Je pense que l’on est un bon fils ou un bon père dans la mesure où l’on s’arrange plus ou moins bien avec son héritage.

8. Une question plus générale. En quoi la Guerra, comme l’appellent les Espagnols, est-elle emblématique ? Quels sont les échos de ce conflit aujourd’hui ? Peux-t-on rapprocher votre roman de ce qui s’est passé en Algérie, par exemple ? Ou de ce qui se passe dans le conflit israélo-palestinien ?

Elle est emblématique du conflit qui va suivre en Europe, conflit qui laissera le contenant exsangue. Je suis persuadé que nous n’avons pas soldé les comptes avec cette part d’histoire. Nous n’avons pas encore pris la mesure des conséquences engendrées par ce cataclysme. Contrairement à ce que pense la plupart des gens, nous les avons très mal assimilées, si mal assimilées que les jeunes générations n’ont pas vraiment idée de ce qui c’est produit. Elles vivent dans un état de paix perpétuelle, décontextualisées des enjeux géopolitiques mondiaux, pensant que les gouvernements démocratiques agissent de manière philanthropique ou machiavélique, que tout n’est que complots ou bons sentiments et que ce qui prime dans l’existence c’est d’abord de cultiver son potager. C’est finalement à peu de choses près ce que pensaient les gens dans les années 30, même s’ils étaient beaucoup plus politisés et moins égotiques.

A propos du conflit Algérien et de la guerre civile Espagnole, je pense que le parallèle serait vraiment intéressant. Il existe des constantes dans toutes les guerres de ce type. Mais je ne suis pas aussi connaisseur que vous pour me prononcer et votre avis sur ce point m’éclairerait. 

En ce qui concerne le conflit israélo-palestinien, c’était évidemment une façon d’aborder le sujet, mais de mon point de vue, à la lumière de ce sentiment d’exil que je porte en moi depuis toujours.

9. Quel a été votre projet romanesque en écrivant Amapola ? Quelles ont été vos sources d’inspiration ? Vos écrivains favoris? Vous avez cité Flaubert, Cervantès...

Le projet peut se résumer en quelques mots. Il s’agissait d’écrire sur le secret, la mémoire et l’exil. Il s’agissait de travailler sur le temps et d’en faire la matière romanesque de mon livre, de dessiner le portrait d’un homme hanté, ce qui explique la forme et la structure non linéaire du récit.

La très belle nouvelle de Faulkner, L’ours, a sans aucun doute influencé ma démarche. J’ai une immense admiration pour l’œuvre de cet écrivain.

Je pense que Faulkner, Conrad, Malcolm Lowry, Juan Carlos Onetti et Cervantès sont mes plus grands modèles.

D’une manière générale, je suis un grand lecteur de littérature anglo-saxonne, hispanique et russe. Les écrivains américains sont les grands héritiers et continuateurs de la littérature européenne du XIXéme. En France, s’inscrire dans cette filiation n’est pas toujours bien vu ou toujours remarqué. Sans doute parce que les lecteurs pensent qu’un livre est une création ex nihilo. L’inventivité du style et la puissance narrative que l’on admet avec enthousiasme de la littérature étrangère, sans doute parce que la critique en a déjà été faite, n’est pas bien reçu quand elle émane d’un auteur local.

10. On dit souvent que la littérature française actuelle est nombriliste, s’agit-il là d’un lieu commun ? Pour autant, vous vous intéressez beaucoup à l’histoire, êtes-vous un cas à part ou une espèce en voie de disparition ?

Saint-Augustin, Montaigne, Voltaire, Rousseau, Chateaubriand et Proust sont des écrivains nombrilistes, mais quand le nombril devient une œuvre universelle, cela fait toute la différence. J’admets que le nombril de mes collègues et compatriotes contemporains me laisse un peu indifférent. Il paraît que les français ont fait un retour à la fiction depuis quelques années… Bon…

J’aime surtout les écrivains francophones, d’abord parce que ce sont, comme vous Salim Bachi, des stylistes, ensuite parce que leur problématique me captive. J’apprécie beaucoup Jean-François Hass, Majdalani, Mabanckou et les grands aînés comme Edouard Glissant par exemple.

J’admets me sentir un peu isolé dans mon pays. Mais je viens à peine de débarquer dans « le monde des lettres ». Pourtant je ne crois pas être en voie de disparition. Il me semble que la littérature mondiale se porte à merveille. J’imagine qu’il n’y aura plus, et ceci avant longtemps, d’endroit rassemblant les écrivains du monde entier, comme Paris a pu l’être dans les années 20. Quand un écrivain apparaît, il est désormais isolé.

11. Sur quoi portera votre prochain roman ?

J’aborderai les mêmes thèmes, ceux de l’exil, du secret familial et de la culpabilité, mais je parlerai cette fois de la deuxième guerre mondiale. La partie centrale du livre se déroulera dans les camps de concentration français. 

Olivier Sebban, Amapola, éditions du Seuil, janvier 2008, 380p.

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